Rien entendu
(Learned irrelevance)
Par Andrée Mercure


Dans mon dernier article, j’écrivais brièvement au sujet des mots et de la perception que les chiens en ont.
Je voudrais aujourd’hui traiter d’un phénomène très fréquemment rencontré que j’appelle le syndrome du «rien entendu».
Prenons comme exemple le nouveau propriétaire qui, par manque de connaissances, utilise le mot « viens » à tout propos avec son nouveau chiot. Il veut le chiot avec lui sur le canapé, il lui dit « viens » en lui montrant la place à ses côtés. Le chien décide qu’il préfère aller boire un petit coup d’eau au lieu de monter sur le canapé.
Quelques instants plus tard, à un moment moins propice pour les câlins, il décide d’y monter. Le propriétaire mé-content demande au chiot de descendre du canapé, il lui dit donc « viens » en lui montrant cette fois-ci le sol. Le chiot s’ancre encore plus profondément dans les coussins... Il est si mignon, de penser le propriétaire, il peut bien y rester finalement.
Il veut que le chiot avance lors de la marche en laisse, il lui dit « viens » en faisant des signes de la main pour le motiver, mais notre petit ami est vraiment fatigué et décide de s’asseoir. Le propriétaire se laisse attendrir et le prend finalement dans ses bras pour entrer à la maison.
Il veut que le chiot vienne à lui, il lui dit « viens » en faisant d’autres signes de la main pour lui démontrer tant bien que mal ce qu’il attend de lui. Par contre, à ce moment précis, notre petit ami décide qu’il serait bien plus amusant d’aller jouer avec une peluche! Il est si mignon, pense le propriétaire, il viendra plus tard...
À ceci nous pouvons ajouter toutes les variantes du mot, en utilisant différents timbres de voix associés à l’impa-tience et/ou la frustration, telles : « viens donc », « viens-t-en », « allez viens », « je t’ai dit viens! », etc.
Comme vous l’avez constaté en lisant mon dernier article, nous nous devons d’être le plus précis possible lorsque nous voulons que le chiot fasse une association entre un son (une parole) et une action. Nous devons nous assurer que l’action se produise le plus rapidement possible après la prononciation de la parole et/ou la démonstration du signe afin qu’une association soit créée.
Dans l’exemple présent, il est utopique de croire que le chien réussira à faire une association quelle qu’elle soit avec le son (la parole) « viens », premièrement du fait qu’elle fut utilisée dans de très diverses circonstances et deuxièmement du fait que, en aucun cas, le propriétaire ne s’est assuré d’obtenir l’action désirée de la part du chiot.
Au contraire, le chien croira plutôt que ce son (parole) n’a aucune signification, qu’il n’est pas à propos (learned irrelevance) et il finira par ne plus du tout le repérer (rien entendu) à travers tous autres les sons auxquels il est continuellement confronté. Surtout ne perdez pas de l’esprit qu’il en entend beaucoup plus que vous!
Il aurait été plus judicieux, pour ce nouveau propriétaire, d’utiliser les mots appropriés pour chacune de ces actions, tels :
« saute » « monte » « ici » - pour l’exemple de monter sur le canapé
« descend » « en bas » « off » - pour l’exemple de descen-dre du canapé
« marche » « avance » « allez » - pour l’exemple de la marche en laisse
et enfin « viens » - parole tout à fait appropriée pour cet exemple
Étant donné que le chiot réagira maintenant plus ou moins à cette parole « viens », il serait préférable d’en choisir une autre lorsque le temps viendra de le conditionner à un rappel solide et rapide. Personnellement, je propose à mes élèves ayant déjà fait cette erreur d’utiliser le « come » anglais. Les élèves étant pour la plupart francophones, il n’y donc aucun danger que cette parole soit utilisée à toutes les sauces.
Donc, à retenir, afin de bien communiquer avec nos chiens, assurons-nous d’avoir un vocabulaire diversifié rempli de paroles assorties à des actions bien spécifiques.
Et vous savez, à bien y penser, cette règle devrait aussi être appliquée lors de nos relations entre humains. En utilisant les mots justes dans les situations appropriées, les communications n’en sont que plus claires!

Membre CAPPDT
Membre IPDTA
Membre Canadian Kennel Club
Propriétaire-instructeure DM École d’obéis-sance Canine
(« clicker » de la Maternelle à l’Utilité + Rally-O)
Elle s’’intéresse à l’obéissance canine depuis maintenant 15 ans. Son chien Clouzo a eu l’honneur de se classer 3ième schnauzer nain et 6ième terrier au Canada en obéissance en 2008 et il n’avait que 2 ans! Elle termine présente-ment son cours de thérapeute en comporte-ment canin chez CCS.

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